Les fissure du temps – Retour

Chronique de Jean-Paul Gavard-Perret



Investitures

En de tels récits étranges, le langage de Josseline Chourry déploie son imaginaire et ses émotions, ses passions. C’est une manière de métamorphoser les insuffisances de la vie et du réel. L’auteure nous fait désirer d’autres existences et présences dans une telle machinerie où elle ne reste pas sur la margelle du temps : elle l’investit en déchirant le noir, des présages dans une sorte de nouvelles d’espérance non sans de noirs nuages « baisers véniels » dans un tel parcours d’écriture et d’une certaine poésie.

L’auteure se glisse dans les interstices des siècles et les fissures du temps où jaillissent « des vagues d’amours recommencés » sur le thème sous-jacent de la réincarnation, ses effluves, ses rêves dans les dédales du cœur, là où visible et invisible se superposent ou s’entremêlent, jusqu’à ce que les brouillards s’effacent et que l’amour enlumine les jardins secrets.

En de telles « fictions », des changements intérieurs exigent le multiple et l’un(e), la réciprocité et l’harmonie. L’auteure nous fait sortir de la petitesse de la personnalité humaine qui devient périphérique dans de tels lieux de l’imaginaire. Ils rentrent en insurrection contre l’obscurité, la violence l’incertitude sous de telles poussées de l’écriture qui échappe au simple contrôle de la raison et de la volonté.

Josseline Chourry invente, creuse la ténèbre sous ses légendes dont le lecteur ignore tout. Au-delà des ombres se dessine un imaginaire des voyages impossibles, inédits à travers le temps et en nouvelle Jonas qui ne vit pas dans le ventre d’une baleine mais par la force de sa création de mondes parallèles
et d’enchantements.

Successions de traversées des miroirs, ses nouvelles créent des suites de partages dans le pouvoir d’expression d’un charme d’écriture d’aventures inédites. Même si de telles histoires, jadis et à propos de son écriture d’imagination, elle les définissait comme des « élucubrations ». Mais qu’importe si des oiseaux volent, s’arrêtent sur la fenêtre d’une chambre on: y voit leur force, leur fragilité mais aussi celles d’amants ou d’amantes qui éprouvent un déchaînement d’angoisses.

Ici, les afflictions s’apaisent : Éros pulse même si l’existence est quelques fois malmenée. Josseline Chourry, en guerrière, traverse les ténèbres où certains de ses personnages ont connu le Styx pour diverses raisons et colères. Mais ces dernières la tiennent en vie. Et l’auteure reste une femme imprévue qui invente ex-abrupto, ce qui empêche de nous enraciner.

De fait, nous lui demandons de partir avec elle. « Lisez-moi, et plus tard vous pouvez me rejoindre » semble-t-elle répondre en substance. Partons vite dans ses voyages, leurs échanges, leurs mots où se glissent des voluptés charnelles, une sensualité baroque comme autant d’effleurements. Pour voyager dans le temps, accrochons-nous donc à celle qui devient cavalière allant du pas, du trot, du trop et du galop dans sa profusion de regards là où naissent des chuchotements, des soupirs qui font trembler le train là où nous lisons un tel livre.

Jean-Paul Gavard-Perret


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