Chronique de Jean-Paul Gavard-Perret

Eloges
Ayant conscience du temps par son intelligence et sa lucidité, Carmen Pennarun, grand-mère désormais, lâche prise (du moins en partie). Elle s’est mise à flâner comme presque loin d’elle – ou (et c’est plus sûr) avec elle. C’est une manière de savoir s’attarder du quotidien, sur des rumeurs, des rires et des pleurs d’enfant voire des « cris d’adultes schizophrènes » (ça arrive).
Tout le mouvement de la vie (mer et grand mère comprise) va et se réactive dans ce livre où il arrive parfois à la créatrice de trouver une manière parfois (et comble du comble) de sauver dieu lui-même ou son absence – qui sans doute « nous frôle sans que jamais / on puisse le toucher ». Bref, lui est sauf et ses traces de bienveillance perdurent.
Mais la poète est libre de dénouer les liens tissés autour d’elle. Certes, ils la retiennent par des obligations jusqu’à « hanter » son ciel d’autant que, écrit-elle, « la joie, mon droit de naissance, s’est étiolée ». Si bien qu’avec le temps, la peau plus dure (et de chagrin), des évènements tambourinent moins.
D’où chez elle ses points de croix du passé empiété qui lui autorisent l’indocilité et un devoir d’insouciance car la beauté en soi attend la soif. C’est la sensation de découvrir, même si des épreuves à vivre permettent d’approcher les fontaines non obscures mais vives. En de folles oraisons contre la toile de la raison.
De sa résistance, tout s’arrime et s’enracine en royaume de l’enfance dont elle redécouvre la tendresse étant devenue moins mère-grand que grand-mère. Cela fait de son livre celui d’images d’une histoire dont les richesse se nichent à chaque instant.
Jean-Paul Gavard-Perret