Voyages, voyages, avec Cyril Boisnier

« La Montagne » Aubière

Aubière. VOYAGES, VOYAGES AVEC CYRIL BOISNIER. 

Cyril Boisnier, habitant d’Aubière, est enseignant à l’université de Clermont-Ferrand dans la filière des métiers de la culture. Il est l’auteur d’articles et d’ouvrages en urbanisme et aménagement. Il est aussi à l’origine d’un blog sur des voyages à vélo en France et à l’étranger (on peut d’ailleurs le rencontrer parfois dans la commune sur son deux-roues avec son fidèle chien Lucky).

Son dernier ouvrage paru en début de mois, Années pérégrines , est une invitation au voyage dans le mouvement de la lenteur et de la simplicité, de l’Oxfordshire anglais au cœur des chaînes du Caucase, de l’Inde du nord à l’Afrique…

Son écriture, à la frontière du récit, de l’essai et de la nouvelle, dévoile une introspection profonde où le voyage constitue un moyen de se retrouver sous un autre ciel, d’outrepasser les limites, de briser les barrières et surtout de se perdre pour mieux se trouver.

Années pérégrines est une invitation à emprunter les chemins sinueux de l’existence, à embrasser l’inconnu et à célébrer la beauté, le bonheur, l’oubli, généreusement dispersés sur la route.

https://www.lamontagne.fr/aubiere-63170/actualites/invitation-au-voyage-avec-cyril-boisnier_14477818/

Années pérégrines – chronique

Jean-Paul Gavard-Perret

Invi­ta­tions aux voyages

Les mots en inci­pit de Proust — « Comme le bou­quet qu’un voya­geur nous envoie d’un pays où nous ne retour­ne­rons plus, faites-moi res­pi­rer du loin­tain de votre ado­les­cence ces fleurs des prin­temps que j’ai tra­ver­sés il y a bien des années. » indiquent par pro­cu­ra­tion les « Années péré­grines » sous forme d’un récit qui devient la quête conti­nue de soi-même.
Le tout en une suc­ces­sion de sen­sa­tions, d’émotions, de réflexions et ce, de digres­sions en digres­sions par une prose poé­tique par­fois volon­tai­re­ment neutre mais néan­moins inci­sive. La France y est décrite – en pas­sant entre autres aux Alpes lors du Tour de France – mais s’y mêlent d’autres diva­ga­tions foraines. Le tout pour recons­ti­tuer la trace de l’enfance puis le récit pro­fes­sion­nel d’une vie.

Cyril Bois­nier reste un voya­geur qui fait abs­trac­tion des obs­tacles. en neuf cha­pitres. L’âme des pay­sages s’y exalte en cette iti­né­rance bou­le­ver­sée, fer­ti­li­sée par la langue bour­rée de des­crip­tions, d’enthousiasmes et d’épanchement. Cela témoigne d’un besoin vis­cé­ral d’évasion nourri aussi par ses lec­tures (Verne par exemple) ou d’autres médiums.
Tout se révèle « sous les houp­piers » , sur la lumière tos­cane et bien d’autres lieux encore. Cha­cun des ins­tants nous fas­cine. Là où le cinéma lui-même n’y est pas pour rien. Rites et cou­tumes se déploient au sein des des­crip­tions. Chaque détail sort de par­tout grâce à la verve de l’auteur qui devient lui-même le monde. Il est capable de per­cer les insi­gni­fiances et les signes du néant.

Il aime les ren­contres des hommes comme aussi « les troncs noueux et ridés des oli­viers sau­vages », les chênes, les mina­rets proches de figues de bar­ba­rie. Pour lec­trices et lec­teurs, il existe tant de fes­tins car, pour ouvrir l’appétit,  les mots ont à dire « un peu gomi­nés » ou de poils noir rasés de près. Si bien que notre esprit se fait voyant et un air frais le ras­sé­rène.
Le monde grouille de l’ancien et les guerres jusqu’à l’ère indus­trielle. C’est comme si la terre trem­blait à la ren­contre de tout ce qui nour­rit l’histoire (par­fois cruelle) en ce voyage ini­tia­tique par lequel — de L’inde, de Pologne jusqu’à Cour­che­vel — le pro­fes­sion­nel et auteur plé­nier a su tout visi­ter pour don­ner à cha­cun bien des invi­ta­tions escomp­tées. Passionnant.

Jean-Paul Gavard-Perret

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Smrti (Ce dont on se souvient)

Chronique de Jean-Paul Gavard-Perret

Les voyages exemplaires

Nina Živanče­vić, d’origine slave, pro­pose un périple inou­bliable à tra­vers plu­sieurs pays et conti­nents. D’un aéro­port à l’autre et en divers entre temps où peuvent se par­ta­ger de véri­tables sen­ti­ments d’Absolu,  de Riyad à Cochin, de Kera­layeem, pour entrer en médi­ta­tion, à Allep­pey dont le temple de Shiva pro­pose de facto les rêves kar­miques de l’auteure, se suc­cèdent ensuite Kera­layeem, Djed­dah, Le Caire, Louxor , Assouan, Rome, Venise, Londres, Lima.

Les dépla­ce­ments deviennent l’initiation d’une nar­ra­tion poé­tique, épous­tou­flante. Richesses en des­crip­tions de décou­vertes sou­vent igno­rées, mais sur­tout puis­sances en réflexions mêlent l’éphémère des lieux et l’intemporel des âmes. Elles tissent un lien intime entre le passé, la mémoire et le rêve.
L’auteure a su défi­nir par­fai­te­ment son voyage exté­rieur et inté­rieur : « le seul pay­sage auquel j’appartenais vrai­ment, le pays où vivait ma véri­table famille – celle des poètes, écri­vains, phi­lo­sophes et artistes. Et peu importe où je vis, du moment que ces per­sonnes font direc­te­ment ou indi­rec­te­ment par­tie de moi. ».

Les sages et leurs écrits (Védas en par­ti­cu­lier) ont guidé son expé­rience trans­cen­dan­tale et géo­gra­phique. Sa pen­sée (entre autres sur le “bar­ba­ro­gé­nie” que cher­chèrent autant Micić que Henri Michaux) reste dépen­dante de tout esprit colo­ni­sa­teur. Michaux mais aussi Sega­len et Artaud (sans oublier encore bien d’autres comme Mora­via ou Paso­lini) sont des modèles de fameux et pré­cieux “bar­bares en Asie” et ailleurs, moins dis­cu­tables que discutants.

L’obser­va­tion de l’auteure dépasse les voyages ima­gi­naires pour nous confron­ter à ce qui advient par le Mul­tiple l’Un. Nina Živanče­vić décrit dans sa gigan­tesque ency­clo­pé­die du savoir les croyants comme les divi­sés de par­tout, là où le sen­ti­ment d’altérité innerve cette écri­ture pré­cise, élé­gante, pré­cieuse et habi­tée. Elle se confronte à tout – même par sa culture jusqu’aux man­geurs des Dieux. Mais res­tent beau­coup plus  de contem­pla­tifs au sens de la spi­ri­tua­lité extrême — même si par­fois, chez cer­tains, elle se mêle à un suprême talent pour la comptabilité…

L’auteure garde le don de l’analyse et du juge­ment modulé dans sa langue, qu’elle a pu se bâtir de lit­té­ra­tures mul­tiples osant des avant-gardistes et aussi  des textes de tra­di­tion hindi, musul­mane, chi­noise, confu­céenne, japo­naise et taoïste, et ailleurs. Œuvrant au « désem­buage » comme à la « puri­fi­ca­tion de l’esprit », elle est clair­voyante pour décrire le monde et la com­bi­nai­son de ces mou­ve­ments dans toute l’histoire et les cultures de pays issus d’une com­pré­hen­sion mys­tique de la vie et de la croyance. Elle agrège  des anec­dotes où d’étranges habi­tudes se mirent et se mettent à souffler.

Tous lec­trices et lec­teurs sont una­nimes envers une telle femme capable de bras­ser les idéo­lo­gies des temps comme de la poli­tique. Y appa­raissent les femmes elles-mêmes. Deve­nant par­fois vic­times, avec un peu de chance elles se trans­forment en lionnes et sœurs vraies — faites de la réa­lité que l’auteure a habi­tée en ses périples, séjour­nant dans bien des chambres d’hôtel de diverses qua­li­tés.
C’est ras­su­rant avec une telle guide capable de créer un  récit anthro­po­mor­phique étonnant.

Jean-Paul Gavard-Perret

Nina Živanče­vić, Smrti (Ce dont on se sou­vient), tra­duit par Raphaël Bau­dri­mont, 2024 – 20,00 € + 2 € frais de port.

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Michèle Reich – Sonnets enchantés

Coulisses et autres lieux

Enfant de la balle à sa façon, Michèle Reich prouve dans cha­cun de ses son­nets un poten­tiel méta­pho­rique com­plexe et puis­sant. Ils sou­lèvent entre autres de nom­breuses ques­tions au sujet de la fémi­nité et de sa repré­sen­ta­tion. La créa­trice met en évi­dence certes le strass mais aussi celles qui se cachent derrière.

La base de sa créa­tion est le corps avec ses mor­ceaux de Luci­fer et d’Ange. Aux lec­trices et lec­teurs d’apprécier l’espace de la ren­contre. Et d’entrer en des flux d’existence. D’où la den­sité émo­tion­nelle de l’œuvre qui joue des réfé­rences cultu­relles, popu­laires.
La poé­sie devient une acti­vité qui montre ce dont le corps est plein sans en chas­ser l’esprit afin que Michèle Reich ne vive pas sans exis­ter de leur dualité.

Avec de telles son­nets contem­po­rains et savants, le spec­ta­teur ne sait plus for­cé­ment à quelle « sainte », « mère », « jouet », « figu­rine » se vouer. En effet, l’auteure mêle des jux­ta­po­si­tions inso­lites qui mettent au défi cer­taines attentes. S’y mêlent des élé­ments sombres et mena­çants et d’autres plus en clarté et en charme.
L’ensemble com­mu­nique un sens per­tur­bant et jouis­sif. Il a ainsi tou­jours un coup, un cran d’avance. Que deman­der de plus que cet envoû­te­ment de matière et de genre ?

Jean-Paul Gavard-Perret

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Smrti (Ce dont on se souvient)

Nina Živančević

Nina Živančević, auteure d’origine slave, vous convie à un périple inoubliable à travers plusieurs pays et continents. Sa plume, imprégnée des cultures et de l’histoire des terres qu’elle arpente, tisse une narration poétique, mêlant subtilement scènes inattendues et réflexions profondes. En artiste de
la mémoire, l’auteure aborde le monde avec l’insolence d’une surréaliste et la curiosité d’un anthropologue multilingue. Smrti révèle une autobiographie égalitaire et transformatrice dans son approche de l’altérité. Chaque chapitre devient une singularité esthétique, créant un lien intime entre la mémoire et le rêve, une exploration des méandres du passé. Živančević nous guide avec élégance dans « le seul paysage auquel j’appartenais vraiment, le pays où vivait ma véritable famille – celle des poètes, écrivains, philosophes et artistes. Et peu importe où je vis, du moment que ces personnes font directement ou indirectement partie de moi. » Ce livre est un périple littéraire où les frontières de l’éphémère s’effacent, révélant l’essence intemporelle de l’humanité.

Format 145 x 205 mm, 246 pages N&B