Chronique de Jean-Paul Gavard-Perret
Lutter
Imen Moussa ouvre sa vie et les femmes par une lumière revendiquée, fruit d’une passion vitale. Grâce à elle, ceux qui tombent amoureux de leurs erreurs le sont au point d’en faire une raison de vie – à la fin, leur vérité ne pourra plus jamais apparaître. Certains « salauds » sont conséquents et nous espérons qu’il auront la volonté de disparaître de la terre.
« Dans ma vie, j’ai constamment bataillé. J’ai toujours eu des épreuves à surmonter. J’ai appris à tenir ma garde pour ne pas laisser trop de chaos s’infiltrer. Les injustices me révoltent. Toutes les causes sont miennes. », écrit Imen Moussa. Et son livre est étincelle. Imen Moussa ne se résigne pas, accepte le sale métier de vivre pour trouver un jour peut-être le lieu ou l’existence parfaite. Son langage règne pour savoir pourquoi c’est ici que nous vivons.
Certes, dit-elle, « Parfois la peine et si immense qu’il vaut mieux s’allonger de tout son long sur le tapis du silence et laisser passer l’orage des tumultes intérieurs ». mais « Ça prendra le temps que ça prendra et ça passera. » L’auteure a décidé de ne plus jamais trembler de jeter ces pierres du cœur pour se donner de l’élan sans bornes sans excuses. Il s’agit écrire dans l’air sans suivre la ligne sans chercher à être à la hauteur.
” Je ne sais pas pourquoi le monde tel qu’il va veut nous mettre à terre. Par l’écriture, par la boue ils veulent notre peau ils n’auront pas notre peau”, dit-elle mais sa langue passe au-dessus de ses rêves pour éprouver encore les mêmes sensations face aux vérités qu’on ignore voire pour s’en approcher, s’en amuser, s’en détacher afin de “donner des chances dans l’imprévisible et continuer à espérer un amour à deux et une famille à cinq ».
Libre de ses clés, elle ne cherche pas à polir des clous plantés en elle pour la repriser : “qu’on me laisse mes brouillons, mes brouillards qu’on me laisse être une femme à vie qu’on me laisse être la femme de ma vie … elle est née fille libre. Et non malléable sous réserves.” Les hommes déversant leur haine, elle part faire ses valises. C’est décidé, d’aujourd’hui elle se modernise. Fileuse de couleurs, son cœur qui crépite est tissé entre les fractions des poèmes et les miracles des impossibles. Chacun au premier pas qu’elle pose hors du lit chaque matin ; car elle se lève avec hâte pour embrasser la vie et son enfant.
D’où ce lyrisme impétueux non sans suavité. Imen Moussa rappelle que la terre est l’enfer comme si la vie est la punition de quasi damnées. Mais soudain le ciel, les étoiles et ce chant ne rendent pas la douleur plus atroce : ils tentent de placer les femmes en plein cœur du paradis. Un lecteur ou une lectrice vit avec une telle langue, avec son très ancien centre harmonieux mais étouffé, et tout autour d’horribles périphéries.
Jean-Paul Gavard-Perret